Wild boar 2013 : Europe de Rogaining

Un jour Julien m’envoie un lien.  Julien c’est le gars avec qui j’ai fait du raid orientation en 2012, raid O’bivwak et raid Bombis. Je clique, je zieute, ça parle d’un format de course que je ne connaissais point: le rogaining (ou la rogaine), une espèce de course d’orientation géante de 24 heures. Je comprends pas trop mais ça parait assez fou pour s’y engager sans réfléchir. Je dis banco et c’est parti pour les championnats d’Europe de rogaine en Espagne qui répond au nom d’animal sauvage: la Wild boar.

Samedi matin, la Llacuna. 10h – Ola !

Pneus qui crissent sur la Hyundai, c’est nous que v’la ! Arrivée fracassante en terre catalane pour découvrir l’univers du rogaining. A première vue, ça ressemble à celui du raid et de la CO. Un mec avec des chaussettes montantes par ci, un autre le cul à l’air par là. On se sent tout de suite intégré. On déroule la carte le poster Oh, la belle map, il y a du taf ! L’échelle est au 1/25.000, équidistance 10m. Temps maximum de course : 24h.

Tandis que des rogainers très concentrés sont en train de tracer leur circuit avec des ficelles et des punaises (si si), d’autres sont occupés à préparer minutieusement leur sac. Nous mélangeons les deux activités un peu à l’arrache et à la dernière minute. Nous élaborons notre technique secrète: la carte accrochée sur la voiture et l’analyse de circuit en tartinant des petits pains au lait à la rillette de saumon.

La carte est blanche et jaune. Le blanc signifie que la “courrabilité » est bonne en hors piste. Sur cette carte de rogaining, la courrabilité n’est pas représentée. Tout est donc blanc, sauf les clairières et les champs qui sont en jaune. Donc avant le départ, à moins d’avoir pris le temps de reconnaitre le terrain aux alentours, il est impossible de savoir si ça passe ou si ça casse en hors piste. En plus de ça, nous n’avons aucune idée de notre “vitesse moyenne de déplacement” sur ce type de terrain pendant 24h. En bons puceaux de la discipline, nous traçons donc sans pression (une première boucle puis nous arrêtons au bout de 15 postes, dans le but de faire le point et de tracer la suite en fonction des premières heures passées sur le terrain)

Mais au fait, qu’est ce qu’on mange ? On a fait simple et efficace. Les petits pains au lait tartinés à la rillette de saumon, deux sachets d’un mix de gâteaux apéros, des petits ‘dwich au jambon et fromage. On soupoudre tout ça de sel*, on emballe et on balance au fond des sacs**. On ajoutera dans nos poches quelques granny et des babybels.

Samedi, 12h00. Départ du centre ville. Bhim – 600 bourrins s’élancent dont quelques teams françaises avec lesquelles nous avons sympathisées sur la ligne de départ. Ca part dans tous les sens car il n’y a pas forcément d’ordre logique pour ramasser les balises. Notre « sens » sera celui vers le nord puis ouest de la carte dans un premier temps.

Notre plus grosse erreur aura eu lieu dès le début de course. 2e poste, nous arrivons au dessus de la falaise au pied de laquelle se trouve une convoitée balise à 8 points (les balises valent entre 3 et 9 points). « Julien et Jérémy, ou comment vendanger 15 minutes à chercher un passage dans les églantiers » Faire le grand détour par le chemin aurait été un gain de temps, ça nous a servi de leçon pour les 23 heures de course suivantes. Notons aussi que sur cette carte au 1/25.000, seules les « mamans falaises » sont représentées, les « petites falaises » de moins de 50m ne sont pas dessinées !

Suite à ça, nous avons donc limité les coupes trop longues hors sentiers. La végétation était infernale, dense et blessante, l’hostilité à l’état pur. Tout ce qui est végétal et qui pique, irrite, arrache, gratte et ponce se trouvait dans cette zone de 90km2. Sur le règlement il était mentionné “vous ne croiserez ni ours, ni serpent, ni moustique”. Normal ! Quel animal, même le plus sadomasochiste des ours qu’il soit viendrait vivre dans un tas de ronces pareil ! Dans ce maquis catalan, même les sangliers utilisent les chemins. D’ailleurs, ce sont souvent grâce à leur traçouille que nous pouvions sortir de ces zones vertes (c’était le paragraphe un peu marseillais sur les bords. « Il y avait effectivement quelques ronces » aurait dit Mike Horn)

Samedi, vers 17h05. Nous traversons un village et nous faisons le plein d’eau chez l’habitant. Surprise, nous sommes chez un belge du nord pas de Calais (cassededi Valmo). Les quelques mots échangés lui font vite reprendre son accent d’origine. Il est là depuis 14 ans, c’est la galère, y’a pas de travail, c’est la crise, y’a plus d’banco, tout ça tout ça. En sortant du village, nous tapons l’apéro salé.

18h30. Le soleil se couche, le vent se lève dans les parties découvertes. Les températures chutent, ayé, c’est vraiment parti pour la Winter and Darkness Expérience. On fait une courte pause pour s’équiper pour la nuit. Changement de vêtements et frontale.

Vers 20h, nous rechargeons à nouveau le meumeulbak, cette fois dans une source (a priori potable puisque l’équipage n’a eu a relever aucun incident gastrique).
Voyant que nous avançons mieux que ce que nous avions eu l’ambition de tracer, nous décidons de revoir notre itinéraire et d’aller chercher les postes dans la vallée. Ca nous permettrait en plus de repasser à la voiture pour recharger le sac en sandwich. Passage dans un petit viillage entre la 86 et la 45, ça fait vraiment ambiance de vacances un soir d’été, des gamins tapent le foot dans la rue.

Vers 00h15, nous atteignons la Llacuna. Il gèle. La petite surprise bien sympa, c’est qu’on peut aussi se faire péter le ventre avec des pâtes à la Hash house. Nous repartirons vers le sud de la carte pour aller chercher les gros points, en laissant la zone à l’ouest pour la fin (elle est moins vallonnée et elle paye moins en points)

Vers 3h30. Ce n’est plus mon heure ! Pourtant, ce n’est pas fini… Jusqu’au levé du soleil, je ne suis plus là, je me traine. Je laisse les manettes à Julien, ne donnant que très rarement mon avis. J’attends que ça passe… ça passe toujours…

Vers 6h30. C’est le levé du soleil qui apportera le petit coup de mieux pour la dernière ligne droite. « Petit coup de mieux« , entendons-nous bien, on se déplace au moins à 4km/h ! Notre itinéraire est systématiquement revu et, compte tenu de l’allure, nous sacrifions en allant des postes initialement prévus. Les deux dernières heures, nous décidons d’ajouter un poste à 8 points, un à 7 et un à 4 pour finir.

11h Sprint final. Les deux derniers kilomètres en 30 minutes, sur terrain plat et roulant. « Oué oué bébé, pleine bourre à 5km/h. Bilan: 19e sénior et peu d’erreurs techniques. Par contre, un manque certain d’entraînement pour tenir un rythme plus soutenu sur cette distance.

* Info qui peut paraitre superficielle et anodine mais il y a eu une longue traque dans l’aéroport à la recherche de ces précieux petits sachets de ressource naturelle anticrampe.
** Précisions et astuces: il est toujours plus efficace de ne pas mettre ça au fond de son sac, mais plutôt dans les poches latérales du sac de son partenaire. Comme ça on se sert en courant et on met ses déchets à la place.

En bons touristes, la gopro a tourné. En attendant la petite vidéo, voici déjà la carte pour donner une petite idée du terrain. Merci à Chronoraid pour le prêt des doigts sport ident

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